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Les bons remèdes du Docteur Dandy.

Question de confiance ou comment jouer safe

Publié le 8 Août 2016 par Dr Dandy in jeux de roles, théorie, techniques, joueurs, partisan

Question de confiance ou comment jouer safe

On parle souvent entre rolistes de contrat social en jeu de rôle et, tandis que certains en font des tartines, d'autres rechignent à se prendre la tête avec des théories "fumeuses".

Pourtant les situations problématiques abondent et nous avons tous eu des moments compliqués voire carrément explosifs autour de la table.

Comment faire alors ?

Il existe plusieurs écoles:

-ceux qui n'en parlent pas. Qui évitent de chercher à poser des conditions ou autres et font confiance aux joueurs pour être responsable. Si on omet les cas désespérés de personnes ne sachant pas se tenir (dans ce cas le jeu de rôle n'a rien à voir et il s'agit plutôt d'un souci de comportement en général) cela marche plutôt bien. Même un enfant de 8 ans est capable d'exprimer ses attentes et ses coups de gueule. A priori car il y a toujours des interstices, des moments gênants. Par exemple quand un joueur se lance dans une diatribe sexiste que les autres n'osent pas contredire par abus de politesse. Ou le cas difficile d'un meneur qui trouve malin de faire jouer des nazis à ses joueurs sans savoir que l'un d'eux descend d'une famille de survivants de l'holocauste. Aie ! Ce n’est souvent pas par pur sadisme. De nombreux meneurs imposent des situations problématiques pour « le bien de l’histoire » sans penser à mal.

- ceux qui évitent les problèmes. Pour eux le jdr c'est avant tout pour s'amuser. Hors de questions qu'un(e) joueur(euse) se sente menacé(e). Donc pas de violence gratuite, pas de torture, de sexe (ou alors léger) et encore de propos polémiques en "isme" (racisme, sexisme, narrativisme). Avec ces joueurs les parties ressemblent à des joyeuses fictions aseptisées et politiquement correctes du genre Star Wars ou n'importe quel film américain Pg13. On est tranquille.

Oui. Mais si, moi, j'ai envie d'un truc qui tâche, qui claque, qui parle d'oppression ou de lutte des classes?

J'opte alors pour la position de ceux qui mettent en place des protections non éliminatoires.

Car oui ! En sortant couvert, en agissant en adulte responsable, on peut taper dans du lourd tout en s'assurant que personne ne se sentira offusqué, blessé, rejeté. Racisme, homophobie, violence gratuite, sexualité débridée, on peut tout évoquer mais pas n'importe comment. Voici quelques pistes:

1- Le panneau. Quand je commence certaines parties de jdr, notamment en convention ou en démos, je parle de ce que je vais évoquer dans mon scénario. Ainsi Outback, scénario one-shot pour Within, parle de misère sociale, de racisme anti-aborigènes et de violence sexuelle. Même si on n'est pas obligé d'appuyer sur ces thèmes-ci, ils sont bien présents et il est plus prudent de prévenir les participants que vous allez dire (via vos avatars) des horreurs qui peuvent être gênantes. En exposant ces sujets à risques, on s'assure de leur pleine acceptation par les joueurs. L'avantage de cette méthode est qu'elle ne prend pas de temps, son désavantage est qu'elle oublie systématiquement tout ce que n'a pas prévue le/la meneur(se).

2- Les lignes et voiles. Trouvaille de Ron Edwards dans son jeu Trollbabe, reprise depuis par Emily Care Boss dans ses jeux, le concept de lignes et de voiles permet de prendre des précautions en discutant de ce que l'on ne veut pas autour de la table. Les lignes sont les frontières à ne pas dépasser. Par exemple si on ne veut pas de torture en jeu, on le défini comme ligne et personne n'en parlera. Les voiles sont les sujets que l'on peut évoquer sans rentrer dans les détails. Typiquement on peut expliciter le fait que les personnages auront une activité sexuelle sans rentrer dans les détails de pénétrations, de moiteurs des corps ou autres. L'immense intérêt de cette technique est de poser les choses clairement afin que chacun et chacune s'exprime sur ses appréhensions. Le problème est que cela peut prendre du temps sur la partie en elle-même et susciter parfois quelques débats.

3- La Carte X. Mise au point par John Stavropoulos, la carte X n'est rien d'autre qu'une simple carte marqué d'une croix. Chaque joueur en a un exemplaire en main et durant la partie peut la poser au milieu de la table. En sortant la carte X, la personne indique qu'elle est gênée ou mal à l'aise avec ce qu'il se passe autour de la table et vraisemblablement dans la fiction. Le contrat est clair et édicté entre les participants: pas de question et on interrompt la narration pour passer à autre chose. Imaginons que tout d’un coup, le meneur raconte comment le grand méchant de l'histoire va se mettre à battre l'un de ses subordonnées. Imaginons encore que l'un(e) des joueurs(euses) présent(e)s ai subi des violences de la part d'une autorité supérieure dans le passé (parent, prof, entraineur, etc.). Il/elle pose la carte et tout le monde s'arrête pour repartir sur autre chose. Bien sûr, la personne peut expliquer ses raisons mais il/elle n'est pas obligé de le faire. La grande qualité de cette carte, c'est qu'elle permet de répondre à toutes les situations car c'est bien la personne concernée qui décide de ce qui la gêne ou pas. Son désavantage c'est que son usage se fait à postériori et qu'un malaise a déjà pu s'installer.

Et toi? Tu fais comment?

De mon côté, j'ai plutôt tendance à jouer en mode "PG13" en expliquant qu'on est "à la cool" et que les propos potentiellement blessant n'ont pas leur place. Et quand j'ai envie que ça tâche, j'applique le panneau ET mes cartes X modifiées. En effet, j'ai préparé des cartes recto-verso avec un recto rouge et un verso vert. Le côté rouge fonctionne de la même manière qu'une carte X. Le côté vert en revanche permet à l'un(e) des joueurs(euses) de valider ce qui se passe en jeu et d'approuver des thèmes difficiles. En effet, pourquoi se limiter alors que l'on peut, tant que personne ne sort du rouge, explorer des thématiques matures et/ou difficiles? Évidemment une seule carte rouge arrêtera toutes les cartes vertes. Le principe permet (en théorie) de se lâcher et de pouvoir appuyer sur les points intéressants tout en évitant de tomber dans du glauque gratuit ou des situations problématiques pour l'un(e) des intervenant(e)s.

Quel que soit la méthode employée, toutes envoient un message clair: nous sommes entre personnes bienveillantes les unes vis-à-vis des autres. Il n'y a pas de raison que l'un ou l'une d'entre vous se sentent mal à l'aise et nous n'abandonnerons personne. Mine de rien, le simple fait de poser ces sécurités rassure et à même tendance à rendre les gens réceptifs à des thématiques ou des moments durs dans la fiction car ils savent que leurs sentiments importent plus que la qualité de l'histoire ou les désirs d'un(e) tel/telle. Et ça c'est incontournable.

Un grand merci à Fréderic Sintes qui avait ouvert des débats sur les ateliers imaginaires

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S
Salut, je suis en train de rédiger un article pour un zine indépendant est-ce que je peux parler de tes x-cards modifiées et te citer?
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D
Oui bien sûr! C'est libre de droit.
P
"Par exemple quand un joueur se lance dans une diatribe sexiste que les autres n'osent pas contredire par abus de politesse."<br /> -> tout le monde ne passe pas son temps à lire le monde par la lorgnette du sexisme, la lutte des classe elle touche tout le monde, femmes et hommes confondus. Ne pas être obsédé par le sexisme, c'est céder au principe de réalité et établir des hiérarchies entre les "problèmes". <br /> <br /> "Ou le cas difficile d'un meneur qui trouve malin de faire jouer des nazis à ses joueurs sans savoir que l'un d'eux descend d'une famille de survivants de l'holocauste. "<br /> -> Par contre s'il a de la famille chez les Nazis on s'empêchera de jouer à Achtung Cthulhu ?<br /> "Aie ! Ce n’est souvent pas par pur sadisme. "<br /> -><br /> Merci pour ce constat intelligent MDR<br /> <br /> Je te remercie pour cette franche rigolade, bonne continuation
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L
Moi comme mes parties sont jouées en club et organisées via un forum (pas jouées, planifiées) j'utilise les signatures avec les badges que tu trouves sur virtuajdr.net. Ce sont des logos qui indiques ta façon de mener en tant que MJ et ce à quoi doivent s'attendre les joueurs. Je me fais une signature différente selon le jeu mené. Parce que je ne mène pas tous les jeux de la même façon.
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L
"qui indiquent" pardon ^^